

Dans le cadre du projet portant sur « le plaidoyer pour l’amélioration de la traçabilité des transferts infranationaux au profit des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun »,PWYPCameroon a réalisé une étude sur la traçabilité des transferts infranationaux au profit des CTD dont les résultats ont fait l’objet d’un échange entre les parlementaires au cours d’une rencontre qui s’est tenue le 08 décembre 2020 au Palais des Congres de Yaoundé. Cette rencontre s’est tenue en marge de la session budgétaire du Parlement du Cameroun. Une session budgétaire particulière parce qu’elle coïncidait avec la toute première session parlementaire pour le vote du budget de l’Etat de l’ère de la décentralisation au Cameroun.
L’objectif de cette rencontre était de susciter l’intérêt et l’implication des parlementaires dans la gestion équitable des retombées de l’exploitation minière au Cameroun. Autrement dit plaider auprès des parlementaires pour la prise en compte de la problématique de l’absence de traçabilité des transferts infranationaux au profit des organismes infranationaux en général et des CTD en particulier au Cameroun.
La rencontre avec les parlementaires qui s’est tenue dans la salle B du palais des Congrès de Yaoundé a connu une forte participation des élus du peuple. Sur les 15 personnalités attendues, 45 personnes ont effectivement pris part aux travaux. Avec une quinzaine d’invités venant des OSC, des administrations, des PTF.
L’évènement a été largement couvert par les médias nationaux (presse écrite, TV, Radio, cybernétique)
La rencontre a été présidée par le Vice-Président de l’Assemblée Nationale, l’Honorable Theodore DATOUO. La phase protocolaire a été ponctuée par trois allocutions :
L’hon. Prince MIKODY, Président du Réseau des Parlementaires pour la bonne Gouvernance des Ressources Extractives (REP-GRE), a pris la parole le premier pour souhaiter la bienvenue aux participants non sans avoir remercier le Très Honorable CAVAYE YEGUIE DJIBRIL, Président de l’Assemblée Nationale du Cameroun, qui a bien voulu donner son accord pour la tenue de cette rencontre et pour saluer la coopération entre la Coalition Camerounaise Publiez Ce Que Vous Payez (PWYPCameroon) et le REP-GRE coorganisateurs de cette rencontre. Il a surtout rappelé les trois grands rôles du parlement à savoir la représentation, la légifération et le contrôle de l’action de l’exécutif pour interpeler les parlementaires sur les grandes les responsabilités qui leur incombent pour une gestion responsable, équitable et transparente du secteur extractif au Cameroun.
Monsieur Sylanus SHULIKA BINILA, Coordinateur national de SNJP et Point Focal de PWYPCameroon a pris la parole en second lieu pour présenter la Coalition Camerounaise PWYPCameroon, coorganisateur de la rencontre, réalisateur de l’étude dont les résultats sont en discussion. Il a reiteré les attentes de PWYPCameroon à l’endroit des parlementaires dans le sens d’oeuvrer non seulement dans la production des lois qui permettent de gérer de manière efficiente, efficace et durable le secteur extractif au Cameroun mais surtout s’assurer que les lois qu’ils ont voté soient mises en œuvre dans leur esprit pour le grand bonheur de tous les camerounais et particulièrement les plus pauvres et vulnérables.
L’honorable Theodore DATOUO, Vice-président de l’AN et représentant personnel du Président de l’Assemblée Nationale, a pris à la parole en dernier lieu pour adresser les félicitations et les encouragements renouvelés du Parlement au REP-GRE, pour sa vitalité et l’engagement de ses promoteurs à œuvrer pour une action parlementaire tournée vers la performance.
Il a reconnu que la problématique au cœur de la rencontre constituait une préoccupation majeure du Parlement et que la rencontre était la bienvenue compte tenu du contexte politique de l’heure au Cameroun marqué par la tenue le 06 décembre 2020 du tout premier scrutin pour l’élection des Conseillers Régionaux au Cameroun et qui consacre le parachèvement du processus de la mise en place des institutions de la Décentralisation.
Il a surtout invité les parlementaires à saisir les contours de cette analyse, afin de mettre en perspective le rôle qui est le leur dans la promotion de la bonne gouvernance au Cameroun en légiférant en bonne connaissance de cause sur ce point précis ou dans le contrôle de l’action publique. C’est sur ce point qu’il a déclaré la rencontre ouverte. Une photo de famille et une pause-café ont clôturé cette première phase protocolaire.
La deuxième phase de la rencontre a porté sur la présentation des exposés au nombre de 2. La première présentation à l’ordre du jour a été faite par M. Fabien NSENGIYUMVA, le représentant Résident de la FMI au Cameroun et avait pour thème «Les enjeux des paiements et transferts infranationaux dans la gestion des retombées de l’exploitation des ressources extractives ».
La deuxième présentation avait pour titre « Transferts Infranationaux et transparence au Cameroun : Les collectivités territoriales Décentralisées face à l’opacité ». Il s’agissait d’une étude sur l’analyse des goulots d’étranglements sur le circuit des transferts infranationaux issus du secteur extractif au profit des CTD faite PWYPCameroon. Il était exposé par Monsieur DONGMO Bernard, Secretaire Technique de PWYPCameroon.
Au terme de sa présentation on retiendra que les causes de l’absence de traçabilité des transferts infranationaux destinés aux CTD sont essentiellement administratives et sont :
- le caractère peu performant des systèmes d’enregistrement, d’archivage et diffusion des informations ;
- l’insuffisance des contrôles au niveau de l’application des textes sur les transferts infranationaux l’information ;
- l’absence de suivi des prélèvements et des reversements des recettes fiscales par les CTD ;
- l’indisponibilité de l’information sur les données des transferts infranationaux aux CTD ;
- l’usage abusif du « secret professionnel » chez les producteurs de l’information ;
- le mauvais reporting des transferts infranationaux par les Contribuables ;
- l’absence du texte d’application du Code minier de 2016 ;
- l’absence de la répartition des impôts en nature prélevés par le CAPCAM depuis 2015
- l’absence des données sur les transferts des CAC ;
- Les blocages d’ordre administratif.
Pour l’amélioration de la traçabilité des transferts infranationaux destinés aux CTD, l’étude recommande :
- Au Premier Ministre: l’adoption du texte réglementaire prévu par l’article 176 alinéa 3 du Code minier de 2016 sur les modalités de répartition de la taxe ad valorem et de la taxe à l’extraction aux différents bénéficiaires.
- A La Direction Générale du Trésor, de la Coopération Financière et Monétaire :
- l’amélioration du reporting des transferts infranationaux qui suppose :
- une meilleure imputation des ressources minières affectées aux CTD dans l’application MESURE de la DGI ;
- L’interphasage entre l’application MESURE au niveau des Impôts et l’application CADRE au niveau du Trésor afin de garantir la sincérité des enregistrements comptables;
- la désagrégation des recettes affectées par nature et par société ;
- l’enregistrement des informations dans l’application CADRE de la DGTCFM par nature des recettes dans les comptes des communes et non par poste comptable ;
- la mise à disposition régulière des ressources collectées aux Communes bénéficiaires par chaque Trésorier Payeur Général ;
- la répartition effective des impôts en nature prélevé par le CAPAM ;
- la création d’un Sous-Compte du Compte 421 XXX VVV « Service Financier des Communes » pour une comptabilisation spécifique des recettes du secteur extractif.
- A la Direction Générale des Impôts :
- la sensibilisation des contribuables au bon renseignement des déclarations d’impôts (papier) et déclaration en ligne ;
- La mise en place d’un système de divulgation aux Communes par la DGI des informations sur les noms des différents contributeurs aux recettes fiscales, les montants payés et la nature des recettes. Ceci leur permettrait de faire le suivi de leurs recettes.
- Au Comité ITIE du Cameroun :
- l’intégration des Communes dans le périmètre de conciliation afin de rapprocher les recettes déclarées dans leurs formulaires avec les transferts déclarés par la DGTCFM ;
- l’intégration du FEICOM dans le périmètre de conciliation afin de rapprocher les recettes déclarées dans leurs formulaires avec les transferts déclarés par la DGTCFM.
- Aux Collectivités Territoriales Décentralisées :
- Le suivi régulier de leur situation de transfert en se rapprochant des services des CTD à la Direction général des Impôts.
- Aux Organisations de la Société Civile:
- La sensibilisation des populations riveraines sur le cadre normatif des transferts infranationaux au Cameroun.
- Sensibilisation et formations des populations sur leurs droits et devoirs vis-à-vis des projets d’exploitation minière
A la suite de cette présentation une phase d’échange avec les participants modérée par Monsieur KUENZOB P. Dupleix F, a permis de recueillir les points de vue des participants sur divers points en lien avec les thèmes exposés. Ils ont abordés les points relatifs à :
- Les retards dans les transferts des recettes affectées au CTD qui constituent des entraves graves à la gestion des CTD. Il faut accorder une dérogation au principe d’unicité de la caisse pour que les recettes des CTD leurs soient directement reversées ou à défaut réduire de manière drastique les délais d’attente dans les transferts.
- La Faible contribution du secteur extractif à l’économie du pays(PIB) et au développement locale en dépit de son fort potentiel. Ceci dénote l’absence d’une véritable politique du développement du secteur minier et une véritable stratégie de mobilisation des revenus du secteur extractif au Cameroun
- Un faible taux d’implémentation des lois votées par le parlement du fait de l’absence des textes règlementaires qui doivent accompagner les lois votées pour leur implémentation. Le code minier ne peut pas être implémenté à cause de l’absence des textes d’application après 4ans de son vote par le parlement.
- Une faiblesse dans le suivi de l’action du gouvernement en ce qui concerne la production des textes réglementaires qui accompagnent les lois votées par le parlement
- L’importance de l’exploitation clandestine des ressources naturelles du Cameroun (or, diamant, saphir, pouzzolane, etc.)
- Le désordre qui sévi dans le processus d’octroi des titres miniers est une véritable calamité pour le développement du secteur minier au Cameroun,
- l’anachronisme qu’on observe entre le nouveau code minier de 2016 et le contexte de la décentralisation veut que cette loi soit relue par le parlement avant sa mise en exécution. Faut-il modifier le Code minier de décembre 2016 ou élaborer forcément le décret d’application attendu? Telle est la plus grande interrogation qui ressort des échanges du Palais de Congrès. La tendance est favorable à la modification du Code au regard du contexte actuel de décentralisation avec le Code Général des Collectivités Territoriales Décentralisées.
- la création d’une société de gestion du secteur minier à la dimension de la SNH ou de la GECAMINE au Congo RDC
- la nécessité de la transformation nationale des ressources naturelles afin de leur donner une valeur ajoutée plus importante et bénéfique pour le pays,
- Les participants ont relevé que le secteur minier est embryonnaire au regard de sa faible contribution dans l’économie. A ce titre, il convient de voir comment accroitre l’exploitation du potentiel. L’exploitation clandestine de l’or a été décriée. Les expériences du Botswana et du Rwanda ont été citées comme pouvant inspirer le Cameroun en matière de gestion des revenus du secteur extractif.
Les Parlementaires ont fait leurs, les résultats de l’étude sur les Transferts Infra nationaux et ont résolu de travailler au suivi de leur mise en œuvre..